Accélération, test du réseau et enjeux de rentabilité
La Belgique affiche actuellement un dynamisme marqué dans le développement du photovoltaïque : de plus en plus de toits, de plus en plus de capacité installée et une part croissante dans le mix électrique national. Toutefois, cet essor s’accompagne de défis techniques, réglementaires et économiques qu’il convient de bien saisir.
Un déploiement en forte croissance
En 2023, les installations photovoltaïques ont ajouté environ 1,8 GW de nouvelle capacité à l’échelle nationale, portant la capacité cumulée du pays à plus de 10 GW.
Le partage régional montre que la région de Flandre a concentré l’essentiel de cette montée en puissance (≈ 1,4 GW en 2023) tandis que la région de Wallonie ajoutait environ 426 MW dans la même période.
En 2024, le photovoltaïque a représenté près de 11,9 % du mix électrique belge, grâce à une production de l’ordre de 8,3 TWh.
Le rythme reste soutenu, même s’il y a des signes de ralentissement dans certains segments. Par exemple, en Flandre le volume d’installations entre janvier et mai 2024 était de l’ordre de 230 MW, ce qui marque un recul par rapport aux années précédentes.
Facteurs de croissance : obligations et contexte favorable
La baisse continue des coûts des modules photovoltaïques, rendant l’investissement de plus en plus accessible. (Voir contexte général)
Des obligations réglementaires : en Flandre, les entreprises consommant plus d’un gigawatt-heure/an doivent installer des panneaux solaires d’ici 1er avril 2026.
Une volonté politique renforcée : la Belgique a relevé son objectif de capacité solaire à atteindre environ 33,6 GW d’ici 2035.
L’essor des grandes installations industrielles sur toits ou sites logistiques, qui compense un ralentissement du segment des petites installations.
Mais des défis et signes de tension
L’essor rapide implique aussi des contraintes :
Le gestionnaire du réseau électrique, Elia, avertit d’un surplus de production photovoltaïque dès le printemps, notamment en cas de forte irradiation et de faible consommation : le réseau doit s’adapter.
Pour les particuliers, la chute des subventions a provoqué un effondrement des nouvelles installations : en Flandre, le nombre d’installations privées dans les quatre premiers mois de 2024 a presque été divisé par deux par rapport à l’année précédente.
Le modèle économique pour les petits producteurs devient plus complexe : certains ménages risquent des frais ou une perte de rentabilité, notamment s’ils injectent de l’électricité sur le réseau et ne sont pas correctement rémunérés.
La répartition géographique et les disparités réglementaires entre régions (Flandre, Wallonie, Bruxelles) pèsent sur la cohérence du développement national. Chaque région a ses propres cadres, ce qui rend parfois la comparaison difficile.
Impacts et opportunités
Le fait que le photovoltaïque atteigne presque 12 % du mix électrique national est un jalon significatif vers la transition énergétique. Cela contribue à diminuer la dépendance aux énergies fossiles et à diversifier la production.
Pour les industriels et grands consommateurs d’énergie, l’installation de panneaux solaires devient un levier de réduction des coûts énergétiques et de conformité réglementaire.
Le stockage d’énergie, les micro-réseaux locaux, et la flexibilité deviennent des sujets centraux pour absorber le surplus et mieux gérer la production intermittente.
Pour les particuliers, l’équation « investissement / rentabilité » se complexifie, mais l’autoconsommation et l’intégration à des communautés d’énergie (energy-communities) peuvent jouer un rôle croissant.
À surveiller
L’évolution des tarifs de rachat et des frais associés à l’injection sur le réseau pour les producteurs privés.
L’accélération des installations de stockage (batteries), nécessaires pour absorber les surproductions et flexibiliser la demande.
Les contraintes réseau (réseaux distribution et transport), parce que l’augmentation continue de la capacité photovoltaïque pose des défis techniques de gestion.
L’harmonisation des politiques régionales et des incitations, afin d’éviter les effets de rupture et d’assurer une croissance durable.
La réalisation concrète des objectifs à long terme (ex. 33,6 GW d’ici 2035) dans un contexte où la croissance pourrait ralentir si le cadre d’incitation s’affaiblit.
Conclusion
En conclusion, la Belgique traverse un moment charnière pour le photovoltaïque : la dynamique est forte, les objectifs ambitieux, mais les défis commencent à se manifester, tant au niveau du réseau que de la rentabilité des petits acteurs. Le virage vers un système plus flexible, orienté vers l’autoconsommation, le stockage et une gestion intelligente de l’énergie, semble désormais incontournable.
